18 avril 2011

Moi, je : Effets d'annonce


Mes petits clous,

Pour cette quatrième édition de 9 blogueurs racontent 9 mois, nous avons planché sur l’annonce de la grossesse.

Je ne sais pas si vous imaginez, mais vu qu’au moment de la découverte de sa grossesse (et après, un peu, il faut bien l’avouer) la femme a à peu près autant de neurones en état de fonctionner qu’une perruche trisomique, ça a été difficile de trouver dix points de vue originaux sur le sujet de l’annonce.


Pour éviter la redondance, je vous épargnerai donc l’annonce à mes copines fébriles derrières leur écran qui attendaient le résultat de mon test en direct live tout juste sortie des toilettes, ou l’annonce à mon homme, genre « bon ben je suis enceinte. Tu reveux des céréales ? » (très différente, d’ailleurs, entre la première et la seconde fois), et autres joyeusetés fort bien décrites par mes camarades.

A la place, j’ai choisi de vous parler de l’annonce au boulot.

C’est toujours délicat, pour une femme, d’annoncer sa grossesse au bureau. Déjà, ça tombe toujours au mauvais moment, on dirait. Vous venez de changer de poste, ou d’être affectée à un gros projet, ou de prendre de nouvelles responsabilités, ou d’acheter de nouveaux tailleurs super classes que vous ne pourrez pas porter. La loose.

Donc, vous attendez pour prévenir. En moyenne, jusqu’à ce que ça se voit, sauf si vous êtes du genre «HIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII J’SUIS ENCEINTE J’SUIS ENCEINTE J’SUIS ENCEINTE» (ceci existe aussi en version homme, «HIIIIIIIIII J’VAIS ETRE PAPA J’VAIS ETRE PAPA J’VAIS ETRE PAPA» ; sauf que là, ça n’a généralement aucune conséquence sur son évolution professionnelle, s’il ne s’obstine pas bêtement à prendre son congé paternité quand ça l’arrange et non quand ça arrange sa hiérarchie).

A un moment, et même si les tuniques larges sont à la mode, il va bien falloir vous prendre en main, et y aller. S’agirait pas d’accoucher au bureau, non plus.

En tant qu’adulte responsable parfaitement libre de son corps et de ses actes, vous vous dirigez donc résolument vers la porte de votre supérieur hiérarchique, heureusement fort sympathique. En chemin, votre dos se voûte un peu, votre pas devient hésitant, votre cœur se met à battre la chamade, et vous vous retrouvez devant sa porte avec l’air d’une gamine de 15 ans prise en faute (note pour les lecteurs: afin de faciliter la compréhension générale du texte, j'appliquerai les conventions suivantes: texte en vert lorsque je parle, parce que le rose ça faisait trop cliché, et texte en rouge orangé lorsque c'est mon suérieur hiérarchique).

- Je peux te parler?
- Je suis occupé là, tu peux repasser plus tard ?

Vous réprimez le « oui bien sûr » qui vous monte spontanément, et avec une pointe de soulagement, aux lèvres. Et vous vous imposez :

- non, j’en ai pour 5 minutes, c’est vraiment important.
- OK, je suis à toi.
- …
- Oui ?
- …j’suis enceinte
- Pardon ?
- J’suis enceinte.
- Ah.
- Ah.
- Et bien… Félicitations ? Enfin, si je peux me permettre de dire ça. C’est un accident ?
- [!!!] Non.

(Rappel aux employeurs : même s’il existe des spermatozoïdes et des ovules de type "warriors" qui passent la double barrière de la pilule et du préservatif, et d’ailleurs je ne doute pas que tout un chacun aura un exemple dans son entourage à me citer, statistiquement au 21ème siècle une femme dans la trentaine, mariée, avec un boulot stable, a une bonne chance d’avoir programmé sa grossesse.)

- Ah. Bon, et bien, ce n’est pas si grave. Ce n’est qu’une question d’organisation. Tu es là jusqu’à quand ?

(Euh, ben je sais pas, ça se programme pas trop... Disons qu’avec les congés pathologiques, et puis si ça va pas avant, à cause des transports… Si j’ai des contractions, tout ça…)

- Enfin, l’avantage, maintenant, c’est qu’on peut décaler une bonne partie des congés maternité de avant à après la naissance, au besoin.
- Ah.
- Oui.
- Bon.
- …
- Je vais te laisser, t’étais occupé. A plus tard !

Vous fuyez de son bureau, à la fois soulagée d’avoir passé cette étape et écœurée de certaines réflexions. A moins que ce ne soit par l’odeur du parfum de la personne que vous venez de croiser dans le couloir. Ou celle de thé au caramel qui flotte dans l’air en provenance du bureau de la secrétaire.

Vous croyez en avoir fini avec cette page, tournée, hop, on n’en parle plus, fini, torché. Détrompez-vous. C’est là que ça commence.

La nouvelle, qui couvait en sous-marin depuis quelques jours à radio moquette, vous explose à la figure.

Tout à coup, la fille du bureau du dessus, que vous croisez une fois par semaine grand maximum dans l’ascenseur et dont vous ne connaissez pas le prénom devient votre meilleure amie, à votre corps défendant. Du plus loin qu'elle vous aperçoit, elle vous alpague à coup de « j’en étais sûre ! » (alors que vous n’avez aucun symptôme visible, limite même pas les seins qui poussent, rien quoi), vous traîne à la pause café mais vous interdit d’en boire (pas dans ton état, voyons), et vous raconte en détail la boucherie qu’a été son accouchement.

Le gros lourd de service (il y en a toujours un, c’est une question d’équilibre) vous croise et vous lance à la volée :

« Ahahahah on va attendre qu’il sorte hein ? De voir sa tête, pour être sûr du père, que ce soit pas ton collègue de bureau ».
Plus de 55 ans, 1m10, et qui mange de l’ail tous les midis, le collègue de bureau. Ahahahah.

Un anonyme : « Tu vas l’appeler comment? »
Euh, pour l’instant il fait 3 centimètres et se situe entre le tétard et le poisson bulle. Némo?

Un autre : « c’est quoi ? »
Je sais pas, un bébé?

Et tout le monde sans exception vous regardera alors le ventre en premier, en souriant en coin, ponctuera chacune de vos interventions un peu musclée d’un définitif « ah, les hormones » qui vous enlèvera toute crédibilité, et vos allers-retous aux toilettes seront minutés et commentés. Par contre, à la cantine, vous ferez la queue, comme tout le monde.

Une grossesse ordinaire, finalement...

A bientôt les petits clous!

14 commentaires:

  1. Trop fort :)
    Ah, le fameux "c'est quoi???".
    Némo...je m'en remets pas.

    Merci Val!

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  2. bien vu mais sympa. côté employeur j'ai eu droit à mon retour de vacances, soit à la fin de mon 3ème mois : "il est encore là" ? genre, pas eu de fausse couche, quelle dommage ! puis lorsque j'avais du mal sur la fin à "saturnin se déplace", et aussi "prennez exemple sur R..., ministre à l'époque qui est revenue rapidement".

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  3. La déclaration au boulot... J'avoue que je n'étais pas tranquille du tout, surtout que mon accouchement tombera sur une période très très hard (effectivement, ce n'est jamais le bon moment !). Mais en fin de compte, alors que ma responsable était de mauvais poil, ça l'a mise de bonne humeur. Une sacrée surprise ! Depuis c'est tout juste si j'ai encore le droit de me lever de ma chaise, mes collègues me couvent littéralement.

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  4. Pour mes 2 premières, je ne travaillais pas, donc pas de problème. Pour le 3è, je travaillais et mon patron a super bien pris la nouvelle. J'ai travaillé jusqu'au bout, y compris depuis chez moi pendant mon congé maternité (chut, faut pas le dire, c'est interdit mais mon patron ne s'embêtait pas avec ça). J'avais prévu un congé parental, le sort en a décidé autrement et retour à la case boulot à la fin du congé mater. Pour le 4è, idem, patron content, surtout après l'épreuve que j'avais traversée, il me propose lui-même de prendre un congé parental que j'ai accepté avec plaisir. Mais, parce qu'il y a un MAIS, à mon retour, poste supprimé et plus aucune affectation... résultat pendant 1 an j'ai fait des photocopies debout devant une machine idiote et qui puait au lieu d'être bien sagement assise devant ma station de travail pour dessiner mes jolis plans... Ahhh je m'en rappellerai de la sollicitude du patron !
    Depuis, j'ai épousé mon nouveau patron, j'ai cassé le moule à bébé et ainsi plus de problèmes MDR !!!

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  5. J'adore le coup du prénom pour le têtard "Némo" :))

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  6. tout simplement super!!!
    le c'est voulu? bon ben c'est bien alors! j'y est eu droit aussi. et les comment tu va faire??? les regard sur le ventre et je peut toucher? (ben non tu voit c'est un peut perso!!!) et aussi on se demandait quant t'allais t'y mettre (ça va j'ai pas 50ans!! tout juste 28...)
    moi je redoutait tellement le moment que j'ai attendu 4mois1/2!!!
    et oui je venais d'avoir un poste plus intéressant, plus de responsabilités, gérer une équipe... que j'espérais sans trop y croire. ça faisait 7ans que j'était dans la boite et avait commencé en bas du bas de l'échelle!!!
    surtout qu'a mon retour retour a la case départ!!! autant dire que j'apprécie mon congé parental pour ma 2de et que je suis pas pressé d'y revenir, encore 4mois...

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  7. @Marie: merci collègue!!

    @Anonyme: prenez exemple sur Rachida Dati... Mouahahahahah... (on connait toujours pas le père, d'ailleurs, dans l'histoire?)

    @Badelel: Tant mieux, profites-en!

    @MarieDK: 1 an de photocopies... Au secours!! (ils sont pas censés te redonner un poste équivalent?)

    @Till: ;)

    @jolie tribu: même remarque que pour Marie, le changement de poste au retour du congé mater, c'est moyennement légal ...

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  8. A bordel, le coup de l'accident...

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  9. J'ai 3 chefs, 3 annonces à faire, 3 réactions différentes.

    Le 1er (un homme): super ! félicitations ! je suis content pour vous !

    Le 2e (une femme): quelle bonne nouvelle, toutes mes félicitations - yeux qui brillent (elle ne peut pas avoir d'enfant et je ne pensais pas avoir autant de joie de sa part)

    Le 3e (une autre femme): ah c'est bien (j'avais l'impression de lui annoncer que j'avais une gastro !)

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  10. Censés oui, censés... mais dans la réalité, c'est ça ou si t'es pas contente, tu pars (et tu mets aux prud’hommes...). J'avais pas envie car je venais d'acheter ma maison et j'avais besoin de mon salaire... Et puis, 1 ans plus tard, j'ai dit qu'ils n'avaient qu'à me licencier et que je ne ferais pas d'histoires ; 1/2h plus tard, j'étais licenciée !

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  11. Awé Mariedk !
    J'ai toujours dis à mes copines que pour ce faire virer illico, tomber en cloque était number 1. ^^

    Bravo Valérie ! Dans le mille !

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  12. J'ai eu droit à "ah et le calendrier ?" pour le second !

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  13. à se demander si on bosserait pas dans la même boîte ^^
    j'ai aussi eu droit au "c'était voulu ?" et aux horreur sur l'accouchement à la pause café (et en dehors de la pause café)
    je rajouterais les collègues très délicats qui faisaient des réfléxion sur mon poid fort sympathiques du genre "on saurait pas que tu es enceinte, on penserait que tu as manger trop de frites" ...
    bref, vivement le deuxième !!

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  14. l'annonce au boulot, un plaisir que je ne connaitrais sans doute jamais :D

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